Dépit amoureux

Atelier d'écriture n°2.

Sujet : (le) dépit amoureux (avec ou sans article)


 


      Dépit amoureux - par Limpudente

 

''Je ne veux pas vous répondre pour le moment, mais laissez-moi un mensonge et je vous rappellerai pas.'' Biiiiip.

 

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Voici ce que toi, le déplorable être - à tort et à travers - aimé as mérité, as provoqué même, avec tes feintes et mensonges, qui s’avalent comme des bonbons. Une calomnie de plus jetée à sa figure (ce qu‘elle endure la pauvre), quelle esbrouffe! Avant d’en venir à cette duperie en forme de belle peinture qui attire l’œil, qu’on veut jusque chez soi et sur les murs,  il y a eu des entrechats, des simulacres de séduction. Puis des silences. Un silence long comme la troisième guerre mondiale - si on exclut l’arme nucléaire, ça va sans dire. Lui faire croire en ta disparition pour que derrière toi -  telle une tortue sous coke - elle cavale : bien vu, touché, elle coule. Elle s’essouffle, tu sais, elle n‘a pas l‘habitude de courir ainsi ; aucune endurance, pour tout avouer. Vraiment ses efforts sont ruinés. Ne vois-tu pas qu’elle n’a plus assez d’imagination pour essayer d’attirer ton intransigeante attention? De t’impressionner avec les cabrioles de son inventivité qui s’étiole, comme la peinture du mur des toilettes où elle a gravé ton nom, le sien, dans un pauvre cœur qui les entrelace sans trop y croire. Et les arabesques tordues de ses conspirations pour qu’un jour tu lui fasses signe que tu as menti d'avoir menti : depuis le début tout était vrai. Elle aimerait bien que tu avoues en rampant, que tu craches le morceau libérateur :  en fait TU L'AIMES. Bien sur... Et ton silence c’était juste pour rivaliser avec le chant des girafes. Pas de quoi s’impatienter, certainement pas de quoi s’inquiéter.


L’obsession du mensonge, ça la tenaille depuis le jour, l’heure précise à laquelle elle a croisé tes yeux fabulateurs, pas très loin d’un réverbère, dans la ville de ses rêves escamotés, sa ville de naisssance. C’est Paris, pas le paradis.


Par exemple, elle se souvient d’un moment qui n’a plus rien de précis : la fin. Sad end version Sade.


Chez toi. Et mes fesses? T’aimes mes fesses? Pas très bavard - ou pas très inspiré - tu ne réponds rien. Silence pendant lequel elle sourit comme une forcenée pour avoir l’air - mais c’est raté - naturelle, pas spécialement excitée d’être dans la même pièce que toi. Bon et mes narines alors, elles te font quelques chose? Et ma langue elle te rappelle quelqu’un, elle te fait du bien? Tu ne lèves pas ta tête de ton oreiller, tes yeux amorphes de ton mur vide. Et mon intestin grêle, il te plaît, hein, mon intestin grêle, il est beau hein non??! Tu vas  répondre diiiiiisi!

 

- chant des girafes - 


Il ne m’aime pas, je crois qu’il ne m’aime pas, se dit-elle. Elle ramasse ses affaires sur le plancher, renifle un peu, profil baissé vers le sol (mais pourquoi cacher ce visage dépité?) enfile son pull à l’envers, son pantalon à même ses fesses vexées par tant de mépris et s’en va. Elle se tire tristement de cet appartement  moisi de celui qui n’aura été qu’un amant raté. L’Amant raté de Lady Vexée. Elle claque ta porte parce que c'est la tienne et qu'à défaut de te faire parler elle veut faire trembler tes parois. Et en attendant l'ascenseur, elle entend, qui émane de tes murs, une chanson dutroncienne, par dessus laquelle ta voix se fait entendre, fluette et enjouée : "le plus difficile ce n'est pas de la faire parler, le plus difficile c'est de la laisser tomber, sans perdre son prestige de mâle"

 


 

 

Dépit amoureux, par Léa Tourret

 

 

Il portait son fardeau, sa cicatrice indélébile et criait à qui voulait l’entendre qu’il était déjà mort. Il mettait en garde les autres: « l’amour finit par vous tuer ! ». On se moquait un peu de lui, et on lui en voulait. La peine d’amour ? Une peine agréable… une délicate futilité.

Il trainait en laisse son cœur meurtri, qui, faisant office de boulet, l’empêchait de déambuler sans que sa silhouette ne se voute et se casse par moments, dès que sa blessure intime devenait trop sensible.

Il vomissait d’amour et faisait chier tout le monde.

Sous couvert de lui donner de bienveillants conseils, on lui intima l’ordre de quitter cette société qui ne tolérait pas d’autres drames que celui de la mort.

 

Il a donc parcouru le monde, pour fuir les hurlements de son cœur, ou peut-être pour les exporter.

Quand on lui demandait son nom, il disait qu’il n’en connaissait qu’un :

Celui qui squattait ses fantasmes.

Il se réveillait en sueur, le souffle haletant, et son esprit encore flou puisait dans ses souvenirs pour réinventer ce qu’aurait été sa vie si elle avait été là.

Ses rêves la ramenaient sans cesse et ils rendaient le réveil chaque jour un peu plus cruel.

 

Il a connu des femmes et les a un peu aimées. Des putains étincelantes, de jeunes aristocrates, des filles un peu idiotes ou trop intelligentes. En les faisant jouir violemment, il captait dans leurs yeux gorgés de plaisir sa propre douleur. Leurs corps interchangeables n’existaient que pour célébrer la véritable déesse, la reine de toutes les autres. 

Et même si il continuait à désirer l’intimité de la chair, il s’exécutait par vengeance, comme si il en voulait à ses conquêtes de n’être que de pâles copies de la femme originelle.

 

Un jour, de l’autre côté du globe, je la retrouverai, pensait-il constamment. Il est plus facile de succomber quand on est loin.

L’ici, c’est le domaine du rationnel, de l’affection ridicule qu’on porte à ses amis, à sa famille, à sa femme qui n’est plus femme mais compagne. « Compagne »… pourquoi pas « gentille accompagnatrice du quotidien » ?

L’amour, le vrai, est dans l’ailleurs.

Alors il  tentait de dénicher l’ailleurs.

 

Le monde eut pitié de lui et laissa le hasard se charger des retrouvailles.

Lui, il pensa une seconde à Dieu, puis remplaça Dieu par le destin (moins exclusif). Enfin, il mit cette rencontre imprévue sur le compte de sa volonté inébranlable et de son amour sans limites.

 

Elle se tenait là, charnelle et magnifique, légèrement chancelante, comme si ses sentiments à lui avaient pris la forme d’une brise et soufflaient sur son corps. Elle n’avait presque pas changé, une petite ride en plus, pas grand chose, le tremblement d’un sourire inexplicable.

Il voyait, il savait. Elle était là, réelle.

Affreusement réelle.

Cruellement banale.



Dépit amoureux par Hélène Salmon


Etude de la question.
1) Précision du vocabulaire
dépit : amertume, chagrin mêlé de colère dû à une déception
amour : qui éprouve de l'amour, un vif intérêt pour
2) Réflexions hâtives
Lorsque l'on se dit dépité, on pense instantanément au terme grand-frère "décapité". Alors, tout de go, on se demande, L'amour fait-il perdre la tête?

3) Réflexivité concernée
Mais ici, le dépit amoureux peut tout aussi bien faire référence au dépit de la personne amoureuse, qu'à l'amour du dépit en question. Qu'entends-je? Le dépit peut-il être amoureux?

Qu'attendons-nous du bien aimé, et à quel moment sommes nous déçus de ne pas avoir eu "la" réaction en bonne et due forme? Le savons-nous nous-mêmes? Dépitées de ne pas l'avoir vu miauler en pattaudant près de notre gorge toute la sainte journée, on lui jette un regard foudroyant voici venu le soir. Lui se mord les babines de ne pas comprendre, puisqu'il n'a fait ni plus ni moins que ce que bon lui semble. Oui, l'amoureux est libre, malgré tout. Alors mangeons nos cigarettes et fumons nos gâteaux en guise de consolation. Il ne comprend rien à l'amour, ce n'est qu'un garçon, après tout. On le sait ça, on le sait même très bien. Mais on se retourne le problème constamment dans tous les sens, comment c'est fichu un mec? Ca pense à quoi, concrètement? Et la seule conclusion satisfaisante apparaît être "Il aime que je l'aime". Dépit.
Si le dépit est rancunier, il doit certainement avoir des airs de vengeance. Mais, bémol : il est trop amoureux de l'amour. Car le dépit naît de l'amour, puisqu'il lui donne substance. En effet, l'amour se nourrit de ces déceptions continuelles, puisqu'elles sont finalement surpassées, puis dépassées par les événements. Ainsi l'amour enfante le dépit afin de ne pas trouver sa fin (sa perfection en somme). Puisque tout ce qui est parfait est ce à quoi on ne peut rien ajouter, l'amour se doit d'être cruel pour subsister.
Elude de la question?

Texte de Ian Packer 

Fiquei sozinho durante dias, sem dizer palavra, nem uma palavra sequer, naquele primeiro fim de semana de Julho em que fui à casa da praia. Apesar da presença deles, e de outras pessoas, nos primeiros dias, consegui me colocar em determinados lugares, reservar a mim certas porções de tempo, que me permitiram não ter face a mim, ao meu redor, ou a alguns metros de onde eu me encontrava, nenhum objeto, nenhuma palavra, que não aqueles que surgiam em minha memória quando cantarolava seu nome e sua beleza.

Texte de Raimundo Fernandez Moujan
Heridos por las frustraciones irreversibles del amor, el más simple movimiento, como levantar una pierna para subir un escalón, resulta difícil. Como si cansados por un gran esfuerzo físico sintieramos dolor muscular. Como si toda la energía del cuerpo se concentrara en la intensidad de ese dolor y no quedara casi nada para las funciones normales de la movilidad.
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